La scène médiatique a hâtivement dépeint le drone Bayraktar TB-2 comme « l’atout aérien de Kyiv » pour lutter contre les incursions de l’envahisseur russe, surestimant au passage son efficacité militaire dans un conflit de haute intensité. Pour autant, « la guerre des drones » en Ukraine ne se limite pas aux TB-2 : elle met également en scène d’autres types de vecteurs civils utilisés à des fins militaires ayant produit des résultats tactiques notables dans les deux camps. L’amplification de la « dronisation » du champ de bataille déjà observée en Syrie et durant la guerre au Haut-Karabagh interpelle désormais par son ampleur. L’utilisation en Ukraine de drones civils militarisés et peu onéreux, sur un spectre de missions élargi, constitue l’un des marquants de l’évolution de la conflictualité aérienne.
Avec l’arrivée massive de ces drones légers sur le terrain militaire, l’équation technocapacitaire de la guerre s’en trouve bouleversée. Les stratégies d’approvisionnement militaire entreprises depuis 2014 auront permis à Kyiv de faire preuve d’une grande flexibilité pour mieux exploiter les technologies civiles à des fins militaires et ainsi supplanter la Russie en qualité et en quantité sur ce segment. La capacité des forces armées ukrainiennes (FAU) à innover pour compenser la plus grande puissance de feu adverse est une leçon inspirante pour nos propres modèles d’armées. Compte tenu de l’expérience opérationnelle accumulée par les parties au conflit concernant l’utilisation de ces technologies non conventionnelles, il convient de tirer des recommandations au profit des forces armées occidentales pour qu’elles soient également en mesure de faire évoluer leur propre doctrine d’emploi des drones.
Depuis 2014, deux tendances en Ukraine et en Russie en matière d’armement aux lourdes conséquences stratégiques
Durant la première guerre du Donbass en 2014, les capacités aériennes de l’Ukraine avaient été fortement réduites par les systèmes antiaériens russes. Mais en ayant démontré toute l’étendue de leur capacité pour pallier les déficiences de renseignement, Kyiv a rapidement saisi que la conjugaison des modes d’emploi opérationnels des drones pourrait constituer un réel atout tactique. Pour ces raisons qui s’ajoutent au faible coût de production de ces plateformes, l’Ukraine a investi entre 2014 et 2022 dans le développement d’une industrie locale de drone tout en bénéficiant du soutien de plusieurs pays membres de l’OTAN pour améliorer ses infrastructures de défense. La remise sur pieds de l’armée de l’air ukrainienne est donc passée par l’acquisition d’un parc complet de systèmes aériens (drones d’attaque, tactiques, de contact, etc.) tout en se séparant d’une partie de ses chasseurs les plus anciens.
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