Les perspectives de paix en Ukraine font actuellement l’objet de vives discussions. Trois positions principales structurent le débat. D’un côté, certains affirment que la meilleure façon de parvenir à la paix est d’offrir une porte de sortie à la Russie par le biais de négociations et de concessions mutuelles. Ce point de vue est notamment partagé par John Mearsheimer, selon qui la guerre en Ukraine est la faute des États-Unis et que ces derniers devraient renoncer à leur soutien aux Ukrainiens. D’autres voix, autant progressistes que conservatrices, estiment que les États-Unis devraient entrer en négociation directe avec la Russie afin de trouver un règlement de paix, lequel passerait nécessairement par une compromission de l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Cette idée semble avoir l’ascendant moral puisqu’elle se réclame en faveur de la paix dès aujourd’hui. Elle est d’autant plus attractive que le risque d’une escalade incontrôlée du conflit pourrait mener à une confrontation directe, voire nucléaire, entre les États-Unis et la Russie. Dans les mots de deux experts : “Forcing a cornered nuclear-armed state led by a man who sees his misguided war as an existential struggle into a complete and humiliating retreat poses far greater risks than the benefits of trying to recapture every square mile of Ukrainian territory occupied by Russian forces. A negotiated cease-fire, with strong enforcement, is the best option.”
D’autres affirment au contraire qu’il ne peut y avoir la moindre négociation avec le président Poutine, compte tenu de ses objectifs de guerre néocoloniaux en Ukraine. La seule fin possible à la guerre, de ce point de vue, est une défaite militaire totale de la Russie et un changement de régime à Moscou. Le président Zelensky a exprimé cette position maximaliste en déclarant que son gouvernement était prêt à dialoguer avec la Russie, « mais avec un autre président russe », et que ses objectifs de guerre comprenaient la libération de l’entièreté du territoire ukrainien, y compris la Crimée. Le président Biden a momentanément soutenu ce point de vue en déclarant que Poutine « ne peut pas rester au pouvoir », avant que ses collaborateurs ne précisent plus tard que Washington ne cherchait pas un changement de régime en Russie. La vice-première ministre du Canada a également fait écho aux appels à un changement de régime.
Une troisième voie se trouve dans la position commune des Occidentaux : la paix sera éventuellement négociée, lorsque la Russie acceptera de mettre fin à son agression, et respectera l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Les États membres du G7 se sont ainsi mis d’accord pour exiger que la Russie cesse « immédiatement et sans conditions toutes les hostilités » et qu’elle se retire de l’entièreté du territoire ukrainien, « délimité par ses frontières internationalement reconnues » de 1991. Si certains remettent en question la nécessité de libérer la Crimée et une partie du Donbass, l’Allemagne qualifie cette position de naïve. La président Macron soutient cette position, affirmant que « Vladimir Poutine doit cesser cette guerre, respecter l’intégrité territoriale de l’Ukraine et revenir autour de la table des discussions ». La stratégie occidentale est donc de fournir les moyens à l’Ukraine, par ses succès sur le champ de bataille, d’imposer les meilleurs termes que possibles lors d’éventuelles négociations de paix.
Qui a raison? Quel est le meilleur espoir de paix en Ukraine ? La meilleure façon de répondre à cette question est de comprendre les origines du conflit et de s’appuyer sur les théories de la fin de la guerre. Sur cette base, la meilleure chance d’une paix durable en Ukraine passe par une révision en profondeur des ambitions impériales russes, le développement d’une force de dissuasion ukrainienne crédible, ou encore par l’imposition extérieure d’une telle force dissuasive. Autrement, le conflit a toutes les chances de se prolonger à un niveau plus ou moins élevé d’intensité.
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